A l 'époque de notre histoire, les chevaliers (comme s'appelaient eux-mêmes les hommes enfermés dans des plaques de métal et montés sur des animaux sans honneur) recherchaient la gloire plus que tout.
Or, tuer un dragon était un acte considéré comme très glorieux. Pour sa part, le dragon ne comprenait pas comment tuer un être vivant quel qu'il soit pouvait être glorieux mais c'était ainsi chez les humains.
Or, tuer un dragon était un acte considéré comme très glorieux. Pour sa part, le dragon ne comprenait pas comment tuer un être vivant quel qu'il soit pouvait être glorieux mais c'était ainsi chez les humains.
Heureusement pour les dragons en général, et pour celui de notre histoire en particulier, les chevaliers avaient tellement embelli leurs exploits au fil du temps que même les hommes les plus inconscients y réfléchissaient à deux fois avant de s'aventurer dans la tanière d'un de ces monstres réputés quasi-invincibles, hauts de six mètres et crachant des flammes. En plus, comme les chevaliers passaient déjà un temps considérable à se tuer entre eux, ça leur laissait finalement assez peu de loisir pour aller embêter les dragons.
Mais il n'y avait pas que les chevaliers qui s'intéressaient aux dragons à cette époque... en effet, une légende, née on ne sait où, voulait que les dragons enlevaient des jeunes vierges et qu'ils ne les dévoraient pas toujours... A vrai dire, cette légende prétendait que les dragons leurs faisaient subir les derniers outrages comme on disait alors et qu'en plus d'être fort bien pourvu par la nature, ils étaient des étalons infatigables et particulièrement imaginatifs.
Bien sûr, la plupart des jouvencelles s'évanouissaient à la simple idée d'être touchées par de tels monstres. Mais certaines, plus aventureuses, plus curieuses ou peut être plus frustrées que les autres n'hésitaient pas à peupler parfois leurs rêves de créatures à écailles et impudiques.
En fin de compte, il arriva que certaines d'entre elles aillent à la rencontre des dragons... elles n'étaient pas toutes vierges bien sûr, mais quelle importance ? Les légendes ne sont que des légendes, tout n'est pas à prendre au pied de la lettre.
Et si la plupart, effrayées par des dragons qui passaient une bonne partie de leur temps à faire peur aux humains pour avoir la paix, repartaient chez elles et se contentaient alors du Gontran ou du Godffroy que leur père voulait bien leur octroyer, certaines allaient jusqu'à pénétrer dans les cavernes menaçantes des monstres farouches et (du moins l'espéraient-elles) lubriques.
Arriva ce qui devait arriver : si quelques unes d'entre elles furent dévorées sans autre formalité, d'autres furent juste "déflorées" par des dragons curieux et effectivement lubriques. Et il s'en trouva certaines pour rentrer chez elles et raconter leur histoire avec un air ravi... Où commença la légende, où commença la vérité, toujours est-il que le tout s'entretenait et s'auto-alimentait.
Notre dragon n'échappa pas à la mode et il commença à voir des donzelles (pas forcément toutes très jeunes d'ailleurs !) rôder autour de son antre. Il eût beau parsemer les environs d'ossements blanchis, pousser des cris terribles et même allumer des feux (le vieil homme lui avait montré comment faire) dans sa caverne pour lui donner une teinte rougeoyante particulièrement inquiétante, rien n'y faisait...
Les donzelles se rapprochaient de jour en jour et puis finalement, certaines finirent par l'aborder. Tremblantes, elles s'offraient à lui impudiquement mais quelle ne fût pas leur surprise quand elles ne furent ni déchiquetées, ni écartelées mais que le dragon les rhabilla doucement en leur demandant d'aller quérir un beau chevalier qui serait plus en mesure de les aider que lui...
Lorsque la gent féminine de la région s'aperçut que le dragon était non seulement d'une taille tout à fait raisonnable (mais néanmoins prometteuse pour ce qui les intéressait) et surtout qu'il était inoffensif et de plus galant et doué de parole, ce fût un véritable défilé.
N'ayant plus le goût de la violence, le dragon, pour avoir la paix encore une fois, finit par céder aux plus insistantes. Ce n'était pas désagréable mais il y prenait bien moins de plaisir que les donzelles qui repartaient chez elles le pas chancelant et le sourire aux lèvres. Oh, notre dragon aurait évidemment préféré de petites dragonnes aux écailles vertes et luisantes, mais à cette époque, sa race commençait déjà à s'éteindre et les dragonnes se faisaient rares. Et puis il avait l'impression ainsi d'être utile, de faire un peu de bien, de compenser en partie ces humains qu'il avait dévorés. Parfois même il discutait avec certaines de ses visiteuses les plus intéressantes. Il papotait, s'instruisait, nouait des relations.
Evidemment, bien loin de lui apporter la paix qu'il recherchait en acceptant ces rapports "contre nature", cela lui apporta la notoriété. Et s'il y a quelque chose à éviter pour un dragon dans un monde régi par les humains, c'est bien la notoriété.
[ A suivre...]
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