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Yomeddine
Comme disait Robert Dalban (in Les Tontons Flingueurs), «Quand ça change, ça change!». Il y a quelques années, un premier film égyptien sur la misère d’un lépreux vivant dans une décharge à ordures aurait arraché des torrents de larmes et quelques cris d’effroi aux festivaliers.Entre deux coupes de champagne à la soirée du Pacte, la critique se serait écharpée entre dénonciation du misérabilisme outrancier des films en sélection et ode au réalisme frontal d’une œuvre radicale et engagée. Rien de cela avec Yomeddine, premier film du jeune réalisateur égyptien A.BShawky. Quelques applaudissements timides ont salué la projection officielle et tout le monde s’en est allé, le sourire aux lèvres, rejoindre le buffet de la Welcome Party. Pourtant, le destin du malheureux Beshay (joué par un acteur non professionnel lépreux, Rady Gamal) avait a priori de quoi couper l’appétit du festivalier le plus endurci. Abandonné enfant dans une léproserie aux portes du désert, il subsiste en récupérant dans une immense décharge à ordures des appareils électroniques hors d’usage qu’il revend ensuite pour quelques pièces à un réparateur. Bien que guéri de la maladie («Mais pas des cicatrices» comme il le répète), Beshay souffre d’être traité comme un pestiféré et voudrait qu’on le considère comme «un être humain».Les seuls à le faire sont un petit orphelin nubien, surnommé Obama (Ahmed Abdelhafiz), qui s’est pris d’affection pour lui et ne le lâche pas d’une semelle et d’autres parias qui l’accueillent dans leur cour des miracles. Il faut dire que Beshay cache sous son apparence monstrueuse une gentillesse congénitale et cœur «gros comme ça». D’ailleurs, avec le chapeau à voilette que lui fabrique Obama, il ressemble à E.T… Lorsque sa femme, atteinte de démence, décède à l’hôpital et qu’il découvre aux funérailles qu’elle avait une mère, Beshay décide de partir à la recherche de ses propres géniteurs.Le reste du film, en forme de road movie, raconte son périple en carriole accompagné de son âne et d’Obama, jusqu’à son village natal, en quête de racines et d’un peu d’humanité.
Un film «mignon» sur la misère du quart-monde?C’est possible! Grâce à l’étonnant charisme de son acteur principal (empêché de venir à Cannes par un problème de visa) et à une vision débordante d’humanité, A.BShawky signe avec Yomeddine un «road feelgood movie» lumineux et gentil, qu’on s’étonne tout de même un peu de trouver en compétition à Cannes.Sa place n’aurait-elle pas été plutôt dans une section parallèle?Sur un thème similaire, Makala d’Emmanuel gras (Grand Prix de la Semaine de la Critique l’an dernier) était autrement plus puissant.