Aux dernières et pâles lueurs d’un soleil mourant
Sur les vestiges de mon armure bosselée
Se détachait dans un noir et pur reflet moiré
La carapace d’un scarabée, fier Artaban.
Sans peur devant les hautes montagnes d’acier
Il montait à l’assaut de mon plastron ouvert
Attiré par le reflux d’une sombre mer
Qui perlait de tous ses rivages émaciés.
Il fût bientôt rejoint par un vif scolopendre
Rapide et nerveux, tout torturé de tourments.
Il me rappelait ce vieux commandant dément
Qui par calcul fielleux interdit de nous rendre.
Il n’aurait pu rêver de soldats plus terrifiants
Que ceux qui m’assaillaient à présent
Avançant leurs phalanges silencieusement
Vers un nouveau Graal pourpre, tiède et ruisselant.
Cette vie épaisse s’écoulant lentement
Semblait amère et métallique à mon palais
Mais à ces cohortes assoiffées promettait
Les délices d’un vin suave, un nectar d’argent.
Alors à la froide lune naissante
Qui lançait ses mercenaires,
Son invincible armée de nuit
Aux myriades grouillantes
De myrmidons implacables
Hérissés de mandibules coupantes
De griffes tranchantes, de rostres acérés,
A l’assaut des replis de ma chair,
J’ai levé mon calice imaginaire…
« Buvez ! Ceci est mon sang
Mangez ! Ceci est mon corps
Et lorsque vous serez ma mémoire
Lorsque vous serez moi
Et que je serai vous
Nous irons ensemble
Attendre ce commandant. »
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Blacksad said: