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De l'ile Louise à l'ile Burnaby - Premières baleines

Une grande éclaboussure au loin, une ombre noire qui ne fait que passer, puis plus rien. Les premiers signes d'une baleine étaient là. Vivian fonce droit dans la direction, se rapproche puis ralentit. L'écume a disparu, l'ombre noire s'est éclipsée, on ne voit plus rien.

Dans mes lectures préparatoires à ce voyage, j'avais étudié le déroulement du comportement des baleines. Après une sonde, la baleine peut prendre deux ou trois minutes avant de remonter. Dans ma tête, je compte : "un", deux", "trois", "...", "vingt-cinq","vingt-six", "...", "cinquante-neuf", "soixante". Rien. Je recommence : "et un", "et deux" "et trois". Un claquement d'eau, un rideau transparent d'eau salée et la vision nette d'une queue échancrée s'offre à nous à deux heures.

Quand je dis deux heures ce n'est pas en rapport à l'horaire mais à la position de notre cible par rapport à l'avant du bateau. La baleine était un peu à droite de l'avant du bateau. C'est une convention que nous avions prise pour mieux nous repérer. Neuf heures représente la gauche (babord) et 3 heures la droite (tribord), six heures l'arrière et midi l'avant.

Elle était à deux heures. Lentement Vivian la ramène sur la position "midi" en faisant délicatement tourner le bateau. Nous n'avons pas le droit de nous avancer à moins de cent mètres des animaux sauf, bien sur, si ceux-ci décident seuls de s'approcher de nous. Ce n'est pas un souci pour mon objectif, l'animal est gros comme un camion et les seules parties émergées sont suffisantes pour la photo.

Malgré leur taille impressionnante, difficile de repérer quoi que soit des parties qui sortent de l'eau en dehors de la queue. Si celle-ci ne sort pas complètement de l'eau je la confonds même avec la nageoire pectorale.

Pressé de mettre les jubartes dans mon boitier j'avais oublié les recommandations de toujours commencer par une observation préalable. Derrière l'oeilleton de l'appareil il est difficile de voir toute la situation. Je rectifie le tir et observe l'animal sans toucher à l'appareil.

Le mégaptère est loin mais dans un grand souffle annonce sa présence, découvre son aileron puis sa bosse. L'animal se cabre et, le dos bien rond, amorce sa descente vers le fond. La queue se soulève et forme un rideau d'eau avant de suivre le corps dans son voyage vers le bas.

Après cette mise en bouche, il est temps de me réchauffer et de rentrer au lodge. Cette matinée de transport en mer a été un véritable baptème gitan, je suis trempé de la tête au pied. Les appareils tenus sur les harnais m'empêchaient de fermer correctement le ciré et l'eau s'est infiltrée partout ou elle pouvait, y compris par les manches. Les boitiers étaient heureusement protégés du ciré.

Un repas chaud m'attend dans le refuge ou un feu de bois a été allumé par Heron et Stessy. Le canot pneumatique passe entre deux iles recouvertes de forêts et de pluie. Le paysage est magnifique malgré le déluge qui s'abat sur nous.