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MöcShplat - big bland blog criti criti
Dans la série des spectacles vus grâce à des billets gratuits...

À cheval donné on ne regarde pas la bride, dit le proverbe. N'écoutant que mon coeur de rebelle, j'ignore sans vergogne la sagesse des âges et je m'aventure sur deux ou trois terrains où mon manque d'expertise est flagrant: Shakespeare, le théâtre et les clowns.

MöcShplat
une adaptation du Macbeth de William Shakespeare

Par Clowns Gone Bad Productions
Mise en scène de Alain Goulem

Avec
Danielle Desormeaux
Marcel Jeannin
Michel Perron
John Sheridan

Au théâtre Centaur de Montréal

On peut dire, c'est une évidence de longue date, que Shakespeare est le dramaturge le plus étudié et le plus vénéré de la litérature anglaise. Sa place dans la litérature mondiale est presque aussi grande que dans sa culture d'origine. Mais pour universel qu'il soit, Shakespeare vieillit. Les thèmes et la qualité de son oeuvre n'en souffrent pas, bien entendu; mais la langue shakespearienne est bien différente de l'anglais parlé aujourd'hui. La majorité des anglophones de naissance ne maîtrisent pas ce langage ancien au point d'en bien comprendre tout le vocabulaire et les nuances linguistiques.

Pourtant, les pièces de Shakespeare demeurent populaires. Est-il possible d'aller au théâtre pour voir une pièce dans un langage dont on n'a qu'une compréhension approximative, et d'en retirer une expérience agréable et enrichissante? Avec MöcShplat, Clowns Gone Bad semble s'être donné pour mission de le prouver.

MöcShplat est une invention délirante: une adaptation comédique de la tragédie Macbeth dans un pseudo-langage inventé de toute pièce par une troupe de clowns. Voici un extrait du synopsis de la pièce:

"Loctane, bing bing bang... MöcShplat aga Quöbang tokaay Häggs. Häggs jojo MöcShplat ka-ching, aga dah-da-da-da-Dah! Aga Quöbang pooït Flea dah-da-da-Dah!

Quindönk aga Doff clop-clop-clop gootle MöcShplat po toddlequay MöcShplat. Laädle manga MöcShplat khrchei Quindönk.

MöcShplat hak-hak-hak Quindönk, wonkta dah-da-da-da-Dah! Ki nooki, MöcShplat hak-hak-hak Quöban. (Flea flye). (...)"

Aussi étrange que cela puisse paraître, ce langage déjanté et onomatopéïque, combiné à la gestuelle consommée des quatres clowns de la troupe, fonctionne à merveille comme source de comédie, sans pénaliser outre mesure la compréhension des dialogues.

Et les clowns? Ils font ce que les clowns font de mieux, c'est à dire parodier les faiblesses de la nature humaine en les amplifiant comme un gros nez rouge sur un visage. Et sur ce vaste terrain, Macbeth est une parcelle d'une grande fertilité.

Tout en demeurant remarquablement fidèle à la pièce d'origine, MöcShplat enfile une succession de numéros de clowns toujours hilarants, parfois brillants et nécessitant souvent une dextérité et une synchronisation qui ajoute à l'effet visuel et au plaisir de l'auditoire.

Sûrement, me direz-vous, faire de Macbeth une série de clowneries est un sacrilège! Les personnages doivent devenir des caricatures et la pièce perdre tout son sérieux! Eh bien non, justement. Le propre d'un bon clown, c'est qu'on puisse y reconnaître à gros traits notre humanité. Les éléments qui font de Macbeth une tragédie: la trahison, l'avidité, le meurtre, la folie, sont tous respectés dans MöcShplat. Le fait qu'on en rie nous en protège un peu, mais si peu au fond...

MöcShplat est présenté au Centaur jusqu'au 13 février.