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RACHEL
Toute poésie authentique élève un psaume de résistance. Alors que l’homme demeure prisonnier « sous la cognée de la haine », le Pur apporte la plus juste nouvelle de la liberté. Il faut avec héroïsme marcher vers cette lumière jusqu’au bout de ses forces. Une soif profonde creuse la foi poétique de Rachel. « Et je me suis agenouillée sur la rive d’un lac murmurant / Pour boire de son eau à satiété ! »

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Langage

Je sais des paroles de beauté inépuisables,
Des énigmes sans fin,
Qui vont et viennent à pas légers,
Fierté depuis la naissance.

Oui mon cœur aime la parole pure comme enfant
Et humble comme poussière.
Je sais des mots innombrables –
Voici pourquoi je me tais.

Ton oreille a-t-elle discerné au creux même du silence
Ma parole qui s’incline ?
As-tu veillé sur elle ainsi qu’un ami, un frère,
Les entrailles d’une mère ?

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Qui suis-je ?


Ainsi je suis : calme
Comme l’onde d’un lac.
J’aime la sérénité de l’attente, les yeux des enfants
Et les chants des parnassim.

Il y a longtemps déjà de pourpre s’est vêtue mon âme,
Et à la cime des montagnes
J’ai pu rencontrer les vents prodigues
Parmi les cris perçants des aigles.
Il y a longtemps déjà …
Si longtemps.

Les âges se transmuent
Et maintenant –
Voici : telle je suis.

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Chant mélancolique

Entends-tu, si lointain, ma voix,
Entends-tu là-bas,
Voix d’un intense appel, voix qui sanglote,
Et par-delà le temps lègue sa bénédiction ?

Vaste l’univers, multiples les chemins
Qui se croisent imperceptiblement, s’écartent indéfiniment,
Un homme cherche, mais ses pas vacillent,
Il ne pourra atteindre ce qui est perdu.

Le dernier de mes jours approche déjà peut-être,
Déjà approche le jour des larmes d’adieu,
Je t’attendrai jusqu’à ce que ma vie s’éteigne,
Comme Rachel attendait son ami.


Scruter deux lignes depuis longtemps écrites :
L’encre est presque effacée,
Le papier froissé a jauni,
S’exhale une odeur ancienne.

Oh le toucher léger, la force profonde
De la main du souvenir !
Voici l’offrande du signe, nulle offrande que le signe –
Et le lointain devient proche.


(Rachel Blaustein, traduit de l’hébreu par Bernard Grasset)

1 comment

HelenaPF said:

Je découvre et j"entends les soupirs profonds de son âme et qui souffre. Merci ma chérie
8 years ago ( translate )