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L'arbre du Caylar, du coté de chez Ray


Dans bien des villages du Larzac, la place centrale est ornée d’un orme champêtre. Le Caylar avait donc son orme. Cet arbre avait été planté à une date indeterminée sur cette même place. Au milieu des années 80, il était, comme la plupart des ormes de France, atteint par la graphiose. Bientôt ce ne fut plus qu’un arbre mort, triste et laide carcasse condamnée à être arrachée. Jusqu’au jour où la magie d’un sculpteur lui a redonné une seconde vie. En 1987, la municipalité du Caylar décidait en effet de le faire sculpter. Un artiste d’origine bretonne, Michel CHEVRAY, héraultais d’adoption, fut choisi pour réaliser ce projet.

Michel CHEVRAY, ancien élève de l’école des beaux-arts de Lorient, est d’abord un spécialiste de la gravure et l’auteur de belles eaux-fortes. C’est également un peintre de talent. Il s’exprime tout autant dans l’art abstrait que dans le figuratif. L’arbre du Caylar a été sa première sculpture importante. Après quelques ébauches faites dès 1987, il réalisa l’œuvre en deux saisons, d’avril à septembre 1988 puis durant la même période en 1989. Cette sculpture aura finalement demandé environ 2 000 heures de travail.

Cette carcasse a essentiellement été peuplée de la base du tronc jusqu’à la cime des branches de toute une cohorte de personnages, d’animaux, de plantes, d’allégories. La plupart des éléments sont le fruit de rencontres qu’a fait l’artiste durant la réalisation de son œuvre. Car, pendant deux saisons, la grande attraction de la place fut de contempler le sculpteur au travail. Michel CHEVRAY ne refusait jamais d’engager la conversation et de répondre aux nombreuses questions qu’on lui posait. Son inspiration s’est donc nourrie des échanges et des contacts avec les gens de passage et les habitants du village.

Sur le tronc, un berger, personnage emblématique des causes, porte sur ses épaules un agneau. Un autre berger, est accompagné de son chien. Suspendue au-dessus de lui une femme, peut -être la muse inspiratrice de ses songes et de ses rêves. Entre les deux bergers, une cardabelle, superbe chardon dont on a fait un des symboles du Larzac et plus largement des Grandes Causses. Complètent la frise, un cheval, un renard, une chouette et enfin une feuille de chêne et un gland qui peuvent être ceux du chêne pubescent, ou chêne blanc, arbre typique du Larzac.

Un puissant bélier porte les deux premiers branches. Sur l’une d’elles, un beau lézard accompagné d’un batracien, grenouille ou crapaud, et à la cime, une morille. Sur l’autre branche, une perdrix surmontée d’une sculpture énigmatique, une étrange tête humaine pensive, mi-morte, mi-vivante. Cette figure pourrait être une sorte de symbole du Larzac, un pays de « solitudes petrées », selon l’expression du géographe Paul MARRES, un pays semblant hostile à la vie où, cependant, des communautés humaines , établies depuis plusieurs millénaires, se sont, en dépit des difficultés, maintenues jusqu’à aujourd’hui. La branche est terminée par des éléments végétaux : des trompettes de la mort, une fleur et un épi.

A la fourche de deux autres branches, un sanglier, espèce commune sur le Causse, porte sur son dos un majestueux rapace dont l’air martial semble terroriser un frêle écureuil. Deux serpents enchevêtrés supportent un homme aux lunettes de soleil. Ce personnage accroché a un parapente imaginaire est un hommage du sculpteur a tous ceux qui pratiquent sur le plateau des sports de plein air. A la cime de l’autre branche traitée d’une manière abstraite, se dresse un coq fringant et superbe.

Sur la branche suivante, un gros hanneton est surmonté des alvéoles d’un nid d’abeille où l’insecte est représenté à plusieurs stades de sa croissance. Plus haut un bébé qui va naître. La cime a été traitée de manière abstraite.

La dernière branche est presque entièrement restée brute, elle rappelle l’état initial de l’arbre. Seuls l’animent une petite mouche peinte et, au somment, un masque de style océanien, également peint. Ce dernier élément est un hommage de Michel CHEVRAY à un autre sculpteur, Hucke PETERO, un artiste polynésien à qui l’ont doit en quelque sorte l’arbre du Caylar. Cet artiste a lui aussi sculpté un orme, un peu avant celui-ci, à Cornus, une commune voisine de l’Aveyron. Là-bas le sculpteur a traité l’arbre selon la tradition polynésienne avec des figures stylisées et des motifs symboliques. Aujourd’hui cette œuvre, moins monumentale que l’arbre du Caylar - il s’agit seulement d’un tronc et du début des branches- est conservée à l’abri, à Cornus. Or c’est l’arbre de Cornus qui a donné à la municipalité du Caylar l'idée de faire sculpter l’orme mort de la place.



Cet article a été publié par ncha sur le site http://www.ciao.fr
Vous trouverez de nombreuses photos de détails des figures ornant cet arbre sur le site http://tardieu.christian.free.fr/Caylar/le_caylar.htm

1 comment

guenievre said:

Bravo pour cet article tres documenté! Tu devrais rajouter à côté la photo de l'arbre!
14 years ago ( translate )