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Les orages dans le corps sombre ne se comptent plus

le corps sombre ne t'appartient pas

et tu voudrais souffrir comme si c'était le tien

Dérisoire main ne serrant que quelques mots maladroits !



Te souviens-tu quand tu étais la femme aux cent visages ?

De ces chemins dans les hasards des villes européennes

Des gares routières, des chambres à l'Est aux ronflements de chaudière

des nuits pluvieuses entre les pattes du lion ?



Les colonnes de la peste faisaient de noirs cauchemars

où s'enroulaient les amoureux d'aujourd'hui

tu envoyais des cartes postales, toujours, Szeretlek

tu laissais l'inquiétude signer à ta place



Dans le silence des ors purs

dans l'oeil glacé des papillons

dans le vert des volutes

tu dansais, tu dansais



Et tu écrivais des poèmes de femme aux cent visages

avec des masques qui tombaient sans arrêt

qui s'empilaient les nuits de solitude

avec des grincements de mains rouillées



tes mots se glissaient dans les chambres des autres

dans un bourdonnement insupportable jusqu'au petit matin

le tabac froid te faisait une couverture pour te cacher

Même par inadvertance les corps ne se touchaient



Mais si pourtant !

La douceur du ventre

tu ne l'as pas oublié, n'est-ce pas ?

Cette main tendre du ventre sur ta joue



et toujours les cartes postales, envoyées, déposées sur l'oreiller

pour les soupirs des autres pas vus pas pris

et toujours le ressac de l'océan conservait l'odeur

un mélange de pin, de myrtille et d'amertume





les rues de ta ville la nuit devenaient les veines de ton enfance

tu en faisais des colliers de rire à faire peur

tu en faisais des tangages violents où se rattraper au bord des trottoirs

tu en faisais des histoires de marins restés à quai



les toits se donnaient à boire, le disque des pieds nus sur le plancher

L’odeur sombre des escaliers au petit matin, une odeur de marbre

Et ce goût dans la bouche, ce goût de bus bondé

A déverser dans le regard hagard du soleil



Parfois tu laissais la femme aux cent visages

oublier un parapluie quelque part

si c’était dans un café les gouttes faisaient des dessins

dont tu étais seule à boire la signification



Mais il fallait repartir t’en souviens-tu ?

Il fallait toujours laisser la petite moisissure du cœur

Le corps sombre déjà ne t’appartenait pas

Et tu le rendais avec des sourires de courage





A présent que la femme aux cent visages

Dort quelque part dans une gare routière,

Une chambre de l’Est, un abribus, un bout de trottoir

Ou même entre les pattes du lion du grand pont à Budapest



Tu as oublié que le corps sombre ne t’appartient pas

2 comments

Anna Mélia said:

Merci à vous miroir de l'aube et Ron Talis d'avoir osé braver mon carnet de route
14 years ago ( translate )

Anna Mélia replied to :

ensuite on vient ramasser les cailloux comme le petit poucet mais parfois c'était des miettes de pain :-)
14 years ago ( translate )